Voici déjà ton quatrième
album, on peut dire que tu ne perds pas de temps ! Kakilambe est annoncé comme assez différent du précédent, Rasta Government. Comment le présentes-tu ?
Oui, c’est vrai ! Il est assez différent dans la
composition des textes et de la musique, il y a plusieurs univers. Mais ça
reste dans la continuité de ce que je fais. Il y a toujours eu beaucoup de
diversité dans ma musique. Là, c’était vraiment voulu, pour donner une image du
paysage culturel africain et, plus précisément, celui de la Guinée. On a
composé cet album en Guinée dans mon propre studio, qui porte le nom de mon
grand-père, le Kanamacina studio, et une
autre partie a été faite en France, pour enregistrer les basses, saxophones et
les chœurs. Sinon, on a joué avec beaucoup d’instruments africains, notamment
de la Guinée et du Mali, comme le balafon, le djembé… Il y a aussi un peu
d’électro africaine, mais je n’ai pas oublié le reggae, auquel j’ai consacré 2
ou 3 morceaux. Une bonne partie de l’album est chantée en soussou, la langue
maternelle de mon ethnie. Le morceau qui introduit l’album, « Abada »,
chante l’alphabet soussou et l’histoire de ce peuple. Elle a été falsifiée et il
était important pour moi de la réhabiliter. Kakilambe
sonne plus africain et aussi plus mondial. Il est ouvert à toutes les couleurs,
avec la mystique et la tradition de l’Afrique. C’est un album qui parle plus en
mélodie qu’en verbe…
Que représente le
visuel de la pochette ?
Le visuel représente justement le masque qu’on appelle en
Guinée « kakilambe ». C’est
un masque qui augmente de taille, jusqu’à atteindre 3 ou 4 mètres de long, et
ça représente aussi un esprit qui vit dans l’eau. Pour moi, Kakilambe, ça signifie l’ascension,
parce que c’est quelque chose qui grandit.
Pourquoi avoir
choisi DJ Redeyes pour cet album ?
DJ Redeyes a une bonne vibration. On s’est rencontré dans
une soirée et il m’a dit qu’il aimait bien ma vibes, qu’il aimerait bien faire
quelque chose avec moi. On partait sur une idée de dubplate ou quelque chose
comme ça. Ca ne s’est pas fait, mais il voulait vraiment qu’on travaille
ensemble. Je suis retourné en Afrique et je l’ai recontacté. Sizzla a voulu
faire un featuring avec moi et directement il m’a donné un bon riddim pour ça.
Sizzla m’a appelé et m’a dit « Takana,
I want to do a featuring with you right now ! » J’ai vu qu’il y
avait le bon truc chez DJ Redeyes pour moi, d’où l’idée d’en faire un projet, incluant
ce featuring-là (« Mama Africa »). Je l’ai immédiatement fait venir
en Guinée pour travailler ensemble, faire un album culturel à dimension
internationale. Il a accepté ma proposition et, franchement, c’était une très
belle expérience, j’espère qu’il y en aura encore plusieurs.
Comment s’est
passé l’enregistrement entre Conakry et Paris ?
D’abord, DJ Redeyes est venu en Guinée. On a
enregistré en seize jours de studio. Il
y avait trop de vibes à Conakry, on a même eu une coupure de courant ! On
était au studio Kanamacina et on avait de bonnes inspirations qui venaient. Là,
on commence à enregistrer et le courant s’en va ! On a du attendre deux
heures ! C’était très difficile, mais une bonne expérience. On a pu
enregistrer tout ce qu’il fallait et Redeyes était content de voir la Guinée. Ensuite,
c’est moi qui ai pris l’avion pour venir en France. J’ai invité quelques bons
musiciens, notamment certains de Tiken Jah Fakoly, au studio RKF de Redeyes, où
on a terminé l’autre partie et où le son a été mixé.
En voyant la
tracklist de Kakilambe, on dirait
qu’il y ait peu de textes en français…
Il y a un seul morceau en français ! Initialement, il
y en avait deux : « Je m’en vais » et « Ce Matin ». Mais, « Je
m’en vais » était un peu trop R’n’B pour l’album. C’est un bon morceau, je
le garde pour un autre projet.
Souhaitais-tu que
cet album se distingue des précédents ?
Avec tout ce qui se passe dans le monde et l’actualité, il
fallait que je me concentre sur ce qu’il se fait dans mon pays pour bien le
mettre en valeur. Je ne peux pas me permettre de faire tout le temps du reggae,
ou de chanter uniquement en anglais. Je viens d’un pays qui a beaucoup de
richesses culturelles, il faut que je travaille bien sur mon message, que je
fasse en sorte que les gens le comprennent. 90% des personnes en Guinée parlent
ma langue maternelle, le soussou. Je pense que Kakilambe remplit bien cette vocation de transmission du message. Ca
n’a rien à voir avec les autres albums, qui sont reggae au moins à 80%. Rasta Government, c’est un album 100%
reggae. Celui-ci c’est un album 100% musique mondiale, world music, musique
africaine…
Il paraît que tu
seras en France au printemps 2013…
Oui, je viens en France au printemps 2013 pour présenter
l’album ! J’espère que toute la France va aimer mon album !
Bamako, Kingston,
Conakry, Paris… où penses-tu enregistrer le prochain ?
Mon prochain album, je veux le faire à Kingston ! Je
suis déjà allé dans le studio de Harry J, mais cette fois, je souhaite
travailler dans le studio de Bob Marley, la légende ! Mon prochain album s’appellera
Good Life, la belle vie, et ce sera
vraiment reggae…
Que penses-tu de
la situation actuelle dans le monde ?
Il y a un manque d’amour dans le monde. Les hommes se sont
arrangés pour faire en sorte que l’argent soit plus respecté que Dieu tout-puissant.
Une bonne partie de l’humanité est perdue… Nous devons apprendre à nos enfants
à croire en l’amour. Nous représentons l’Afrique pour faire savoir au monde
qu’elle a besoin d’être rétablie. Il y a beaucoup de jeunes en Afrique, mais il
n’y a pas beaucoup de travail. Il faut que l’Afrique soit en paix pour que le
monde entier soit en paix. C’est le berceau de l’humanité… Nous sommes des
enfants de Dieu. Dieu et notre père et le monde est notre famille. C’est de
tout ça que Kakilambe parle ! Ca
parle du travail, du respect, de la tradition…
Tu crois à la
victoire du bien sur le mal ?
Le bien l’emporte tous les jours, mais ça prend beaucoup de
temps. La vérité ne vient pas s’imposer
comme ça, il faut qu’on soit libre du mensonge pour voir la vérité. Le mensonge
n’est là que pour un instant, la vérité demeure pour l’éternité…
Pour finir, un
petit mot pour les lecteurs de Reggae Vibes…
Maximum Respect à tous les lecteurs de Reggae Vibes !
One Love à vous tous ! Big up à Reggae Vibes Magazine qui fait la
promotion de la culture et de la musique reggae. C’est beaucoup de bénédiction,
beaucoup de force, et beaucoup d’amour surtout. Big up à vous depuis la Guinée
Conakry !
Simba
(pour Reggae Vibes Magazine #27 - décembre 2012/janvier 2013)
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