mardi 31 mars 2020

Morgan Heritage - Interview

Loyalty est le douzième album studio de Morgan Heritage. Le trio vocal de l’une des plus légendaires familles jamaïcaines du reggae est reconnu dans le monde entier, en témoigne le Grammy pour Strictly Roots et les autres belles nominations.

Portée par les voix exceptionnelles de Peetah, Gramps et Mojo, la Morgan Heritage Family fait partie des valeurs sûres qui savent travailler le reggae en profondeur sans jamais perdre son essence. Sortie en août sur le label CTBC Music Group, le douzième album de la formation compte seize morceaux, au style rockaz comme ils savent faire. Interview avec le groupe entre deux concerts aux Etats-Unis. Co-produit avec, entre autres, Jerry Wonda, Jason J-Vibe Farmer, Shane Brown et Aston Barrett Jr., les Morgan ont aussi convié sur ce nouveau disque Popcaan, les artistes africains renommés Stonebwoy, Diamond Platnumz et Patoranking, les experts du reggae-rock Pepper et Iration, ainsi que la voix de Jeff Koinange, animateur des Emmy Awards, sur la piste d’introduction.

Comment pouvez-vous présenter en quelques mots votre nouvel album Loyalty ?
Loyalty est un disque qui exprime l’état universel de la musique reggae. Tous les styles actuels du reggae se trouvent sur cet album. Nous sommes fidèles à notre genre, et aussi ouverts à de multiples expérimentations.

Quel sens Loyalty a pour vous ? Pourquoi avez-vous choisi ce titre ?
Loyalty signifie pour nous la loyauté et le dévouement que nous accordons à la musique reggae. Et pas seulement nous, mais aussi les fans, les DJs de radio, les sound systems… Nous avons choisi ce titre parce que c'est exactement ce que nous ressentons, après plus de vingt ans d'activité. Nous restons fidèles à la marque Morgan Heritage, une famille, un groupe… Heritage for life !

C’est votre douzième album ! Quelle particularité a-t-il par rapport aux précédents ?
Il comporte toutes les sonorités possibles de reggae. Le spectre complet de cette musique se trouve sur cet album, en quelque sorte. D'où vient la musique, où elle se trouve, et où elle va…

Comment se sont passées les sessions ? Où l'avez-vous enregistré ?
Les sessions d'enregistrement ont été très stimulantes, et c'est ce qui nous a motivés à le faire avec tous les moyens nécessaires. C'était aussi amusant et édifiant. Il a été enregistré partout où nous pouvions le faire. Où que nous soyons, nous avons travaillé dessus. Nous avons pris dix-huit mois en tout pour faire cet album.

Il paraît que vous vous trouviez tous à un endroit différent lorsque vous l’avez terminé… Comment travaillez-vous ensemble quand vous êtes éloignés ?
C’est vrai, Mojo était au Kenya développant nos projets philanthropiques, Peetah à Miami pour finaliser la production de l’album et Gramps faisait le tour du monde avec son épouse pour la promotion des produits Masya CBD. Nous utilisons la technologie pour travailler et faire de la musique lorsque nous sommes tous à distance. Comme vous pouvez l’imaginer, il a fallu beaucoup d'appels vidéo et de téléconférences sur Whatsapp. (rires)

Sur quels projets travaillez-vous en dehors de la musique de Morgan Heritage ?
Nous travaillons notamment avec d'autres artistes, en tant que producteurs, auteurs-compositeurs… Nous faisons également beaucoup d'autres choses en dehors de la musique et ce serait génial d’en parler. Tout ça prend beaucoup de temps et, comme pour la musique, il est important de faire les choses bien.

Et qu’en est-il de vos carrières solos respectives ?
Rien de nouveau pour l’instant… Nous nous concentrons sur Loyalty. En ce moment, tout ne tourne qu’autour de ce nouvel album.

Avez-vous un disque préféré de Morgan Heritage ?
Pas vraiment, nous les aimons tous ! Chaque album représente une période différente de nos vies et de notre carrière. Nous les avons tous faits avec le cœur, et ils nous parlent.

Y aura-t-il des concerts du groupe en France bientôt ?
Oui, très bientôt. Nous sommes en tournée cette année et encore toute l’année prochaine, et allons passés sur tous les continents ! Nous aimons beaucoup le public français et l'amour qu'il a pour la musique reggae.

Au fil des années, vous êtes restés fidèles à votre style rockaz et jouez toujours des instruments. Quelle vision de la musique avez-vous ?
Notre vision est de faire notre musique comme nous le sentons et aussi de voir la musique évoluer de génération en génération. Le reggae, comme tous les autres genres, continuera à évoluer avec chaque génération à venir, et nous aimons ça !

Que pensez-vous de l'évolution et des nouvelles vibrations de la musique reggae ?
Elle est très variée. C'est plutôt beau et rafraîchissant. C’est vraiment ce que nous aimons.

Quels artistes aimez-vous actuellement ? Avec qui aimeriez-vous travailler ?
Nous aimons énormément d’artistes, la liste serait trop longue pour tous les citer ! Nous souhaiterions travailler avec tous les artistes qui nous ont inspirés au fil des ans, si c’était possible…

Pour finir, que voudriez-vous dire aux lecteurs de Reggae Vibes…
Ecoutez Loyalty, ça devrait vous plaire ! Et suivez-nous sur nos médias sociaux, Instagram, Facebook, Twitter… @MorganHeritage

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine n°68 - octobre/novembre 2019)

jeudi 26 mars 2020

David Cairol

Pour son troisième album, David Cairol met le reggae à l’honneur. Enregistré à Kingston avec des musiciens de renom, le chanteur explore pleinement son amour des rythmes jamaïcains. Sortie prévue l’année prochaine.
David commence par traduire les textes des Wailers, qui sont le déclic qui le fait chavirer dans la musique vers quatorze ans, puis s’achète une guitare, avant d’aligner ses premières rimes, à l’aube de ses dix-huit ans. Comme le veut la tradition, il commence par utiliser des faces b pour poser sa voix. Son tout premier concert a lieu à la Fête de l’Huma avant Idir. David écoute alors beaucoup de reggae roots, de la soul, du hip-hop, de la folk, de la world et du rock… Au croisement de toutes ces influences, son premier album, Initiales, qu’il réalise avec Natty de Sinsemilia, après une tournée où il fait la première partie du groupe, sort en 2013. Il enchaîne ensuite les concerts, avant de s’attaquer à son second album U.N.I., moins acoustique, plus moderne, et toujours aussi métissé, réalisé avec Jérôme Martineau-Ricotti, son batteur depuis les débuts. Cette suite discographique est le résultat d’un financement participatif où David en a profité pour apporter l’album en mains propres aux contributeurs et leur offrir un petit concert privé. « Pour aller au bout de mes idées, nous avons réalisé cette tournée en duo, guitares et caméra sous le bras, en voiture électrique, grâce à un partenariat avec Renault. Nous avons fait 4000 kms en Zoe en un mois, avec des concerts tous les soirs en France et même en Suisse ! »
Pour son troisième album, David Cairol a annoncé la couleur : il sera principalement reggae ! L’histoire commence en novembre 2017, lorsqu’il part en Jamaïque sur un coup de tête… « Ce voyage m’a totalement bouleversé. Les connexions se sont faites très rapidement, ça a été magique ! Le fait de vivre au son du reggae tous les jours m’a conforté dans l'idée qu’une partie de mon cœur est là-bas, c'était comme revenir à la maison… Le reggae est la musique qui me fait le plus vibrer. J’ai écrit quelques-uns des titres du prochain album dans la chambre où je logeais à Kingston durant cette période. » Avec Matthieu Bost qui réalise et supervise l’ensemble du disque, ils ne se sont pas privés de solliciter les meilleurs musiciens de l’île pour enregistrer : Earl Chinna Smith (guitare), Sly Dunbar (batterie), Daniel Axeman Thompson (basse), Bongo Herman et Harry T (percussions), Winston Bo-Pee (guitare), Dalton Browne et Latoya HD (chœurs), Stephen Stewart (claviers)… Grâce au réseau de Bost, ils sont rejoints par Courtney Bam Diedrick (batteur de Damian Marley), Winta James (claviers de Damian et producteur de Protoje), Hector Lewis (percussionniste et choriste de Chronixx), Danny Bassie (bassiste de Protoje) et Paris Lamont (claviers de Protoje). Quant aux featurings, on note la présence de Judy Mowatt, Var (Inna de Yard), Brinsley Forde (fondateur et chanteur d’Aswad)… Si la date de sortie et le titre n’ont pas encore été dévoilés, « Last Bus », est le premier clip diffusé sur la Toile. Trois autres sont prévus dans les prochains mois, pour patienter jusqu’à ce nouveau disque, qui promet de bien bonnes vibrations.

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine n°68 - octobre/novembre 2019)

mardi 17 mars 2020

S'n'K

On vous avait parlé de Singah et son EP Overflow, tout en annonçant que le chanteur se consacre désormais à son duo avec le rappeur Kip’Poz, logiquement nommé S’n’K. Leur premier EP, From The Bedroom To The Stage, est sorti il y a tout juste un an, alors que son petit frère, S’n’K Fait Ses Gammes, vient de voir le jour, le 28 juin dernier.
Nos deux chanteurs se sont rencontrés lors d’une jam session La Petite Ecurie, au New Morning à Paris. Le courant est si bien passé que l’idée d’une collaboration reggae hip-hop émerge immédiatement. Leur premier EP From The Bedroom To The Stage est le résultat des enregistrements qu’ils ont faits ensemble chez Singah, puis au Dig Studio, avant sa sortie en octobre 2018. « Le titre symbolise exactement ce que ce projet nous a apporté. Nous avons commencé à le produire dans la chambre et, en parallèle, nous avons fait nos premiers concerts et scènes. Il nous a appris à travailler en duo, à explorer nos différences et nos points communs, pour obtenir un son qui met en valeur notre univers. Deux invités ont participé au projet, Scars et Joseph Cotton. La rencontre avec Scars s’est faite très vite, car il est l’un des premiers à nous avoir tendu la main pour nous faire jouer en dehors de Paris avec Selecta Antwan. Quant à Joseph Cotton, c’est au détour d’un concert où nous faisions sa première partie que le feeling est né. » La release party de ce premier EP a eu lieu à La Boule Noire en octobre dernier.
Sans perdre de temps, ils continuent de suivre leurs inspirations, ce qui laisse rapidement entrevoir la venue d’un second EP, intitulé Fait Ses Gammes, car le duo, alors en pleine exploration musicale, creuse peu à peu ses marques. De décembre 2018 à juin dernier, ils proposent un clip tous les mois des morceaux de ce deuxième projet, dont la moitié avec des invités, tels que Devi Reed, Volodia… « Il est dans la continuité du premier, mais plus abouti musicalement. Les instrumentaux ont tous été réalisés par Singah, avec parfois l’aide des artistes avec lesquels nous travaillions. Nous avons pu nous exprimer sur des thèmes plus larges, plus profonds, par exemple l’écologie, ou encore la problématique de la famille, qui sont des sujets qui nous tiennent à cœur… De plus, les featuring viennent tous d’univers différents et on a fait le choix de rejoindre leur style respectif pour proposer un projet varié. » S’n’K bosse maintenant sur son premier album et compte bien aller encore plus loin avec toutes les idées qu’ils ont en tête. Après une tournée d’été plutôt intense de près d’une trentaine de dates, le duo prépare déjà la release party de Fait Ses Gammes, qui aura lieu le 11 janvier prochain au FGO Barbara à Paris.

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine n°68 - octobre/novembre 2019)

vendredi 13 mars 2020

Devi Reed

Le nouveau projet de Devi Reed, One Vibe A Week, qui a démarré en mars dernier, lance le défi d’un morceau tous les vendredis pendant un an, pour aboutir au printemps prochain à la sortie de l’album Take It OVAW.
« La graine de ce projet a germé dans ma tête un soir où j’écoutais toutes les compositions que j’avais enregistrées depuis des années. Il y avait vraiment de tout ! J’ai eu envie de sortir du schéma classique d’un album tous les deux ans, et j’ai réfléchi pas mal de temps. J’ai vu que j’étais bien entouré pour pouvoir réaliser un projet aussi fou que de sortir un titre inédit toutes les semaines pendant un an. Le label Khanti Records était prêt à jouer le jeu, puis nous avons trouvé le nom One Vibe A Week, et avons tous bien aimé le concept ! Nous avons commencé le vendredi 22 mars pour l’arrivée du printemps et le dernier morceau sortira en mars 2020. A la fin de chaque saison, l’album sort en digital sur toutes les plateformes de streaming et sur Youtube. Il y aura donc quatre albums, Spring, Summer, Autumn et Winter. Au fur et à mesure, nous demandons au public de choisir leurs trois titres préférés de chaque saison, pour ensuite sortir un album physique qui sera distribué dans les bacs à partir d’avril 2020. Un genre de Best Of qui s’appellera Take It OVAW. L’idée, c’est de créer cet album tous ensemble », avance Devi Reed.
« Il y a des morceaux qui étaient déjà bien avancés, en termes de paroles et de mélodies, et aussi beaucoup de riddims que me propose Amarga, le duo que forment Cydot et Otaam, où là j’écris les textes et pose ma voix dessus au fur et à mesure. Nous sommes obligés d’être bien organisés pour être dans les temps, car c’est très intense de sortir un son toutes les semaines. Nous fonctionnons par saison. Pour les enregistrements, tout doit être prêt un mois avant la sortie. Dès qu’une saison est prête, nous attaquons directement la suivante. Concernant la campagne de financement participatif Ulule qui a permis de réaliser le projet, j’en suis très satisfait ! Ce que je retiens le plus ce n’est pas le montant collecté, mais les nombreux retours et encouragements des contributeurs », avoue Devi qui vient juste de recevoir les masters de la saison d’automne. « Je suis très excité à l’idée de les sortir, car ce sont douze titres exclusivement en français. C’est une première pour moi ! J’ai chanté uniquement en anglais pendant dix ans avec les Banyans et, depuis que je suis en solo, je ne mets en général que deux ou trois morceaux en français sur un album. Le français me permet d’avoir un autre style d’écriture, de rentrer plus dans les détails, de manière plus intime, comme sur le titre écrit pour mon père « Ne change pas », ou « Semer » qui invite à développer son propre jardin… C’est ça aussi One Vibe a Week, prendre des risques, tenter des choses ! Nous prendrons la route pour défendre au mieux sur scène ce projet fou et ambitieux dès avril 2020, quand l’album physique Take It OVAW sortira. D’ici-là, j’aimerais tourner quelques clips pour certains morceaux de l’automne et l’hiver… » Voilà un rendez-vous hebdomadaire essentiel !

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine n°68 - octobre/novembre 2019)

lundi 9 mars 2020

Ilements

Originaire de Saint-Martin, Ilements vient de sortir son deuxième album, Cyaan Trap Me, chez Yearning Music. Disponible en CD et digital depuis le 19 avril.
Ilements commence à chanter vers l’âge de douze ans. Il en a à peine seize quand le Saint-Martinois Ambassador Junior Lion le prend avec lui en tournée pour défendre son premier album. De The Burning Roach, il devient Ilements, baptisé ainsi par des frères rasta jamaïcains, parce que sa musique est aussi changeante que les éléments. A Saint-Martin, il grandit dans le quartier chaud de French Quarter (Quartier d’Orléans, en français), baignant dans la culture créole et afro caribéenne, dans le reggae et le dancehall. Il ne peut résister à l’envie de transmettre sa culture par la musique. A ces styles de prédilection s’ajoutent le blues, le jazz, le rocksteady, le ska… L’île étant moitié française et moitié hollandaise, on y parle couramment anglais, français et créole, ce qui influencera aussi son écriture. Il quitte son île en 2008 pour rejoindre Paris, puis plus tard l’Aquitaine, pour arriver à Toulouse. En 2013 sort son premier EP Skin A Burn sur le label parisien Street Rockaz Family et les premiers clips, « We All Can Make It », « Ghetto Situation », « Weh Dem A Feel Like »… Il aura fallu cinq ans pour finaliser ce premier projet qui permet à Ilements de se faire connaître et donne lieu à de nombreuses scènes. Son premier album Justice sort en 2016. Après une écriture plutôt rapide des morceaux, il réalise cet album en autoproduction avec RKF Production. L’artiste y montre la base de sa personnalité musicale, du reggae roots and culture.
Enregistré entre 2016 et 2018, son nouvel album Cyaan Trap Me est sorti le 19 avril dernier. « Cyaan Trap Me signifie en français : « tu ne peux pas me piéger ». Je trouve que c’est un beau jeu de mots pour exprimer le fait que je ne rejoins aucunement les messages délivrés par certains artistes dans ce milieu. Une chose intéressante, j’y ai également introduit des riddims aux couleurs trap avec un flow reggae-dancehall. Cet album est plus urbain. C’est un mélange de styles, de genres musicaux, mais tout aussi conscient que Justice au final. Il fallait vraiment que je laisse sortir cette énergie qui sommeillait en moi. Cyaan Trap Me est surtout un moment de liberté où j’ai pu m’exprimer comme je le souhaitais, sans pour autant retourner ma veste. Ce n’est rien de plus qu’un des nombreux chapitres de ce livre, un chapitre musical de ma vie.» En sound system avec Dreadlockless Sound, en acoustique avec Fyah et Zion à la guitare et à la batterie, ou avec le Earthquake Family Band au complet, Ilements est toujours prêt pour la scène et se fait une joie des concerts prévus pour l’automne et l’hiver. Tout en travaillant à la sortie de quelques singles, un nouveau clip extrait de Cyaan Trap Me est en préparation. On parle également d’une sortie exclusive du disque en vinyle, de voyages en Jamaïque avec le Earthquake Band et d’un nouvel album reggae… Rien ne semble pouvoir arrêter Ilements !

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine n°68 - octobre/novembre 2019)