Quand et comment est né le groupe Nai-Jah ?
A mon arrivée en France, en 2006, j'ai commencé à
écrire et à composer des morceaux en guitare-voix. Quelques années plus tard,
en 2010, j'ai créé le groupe Nai-Jah. Nous étions deux, puis nous avons vite
pris un tuba à la place de la basse. Le groupe est aujourd'hui composé de cinq
musiciens : Nicolas Delaunay à la batterie et aux chœurs, Raphaël Macler aux
claviers et aux chœurs, Gordon Tian à la guitare et aux chœurs, Guillaume
Monier au soubassophone, et moi-même, Mahakwe Wadike, au chant et à la guitare.
Votre musique est à la fois reggae et world.
Quelles sont vos influences musicales ?
Mon père est un grand fan de reggae roots, comme Burning
Spear, Third World, Twinkle Brothers et beaucoup d'autres… Ma mère écoute énormément
de chanson française, Georges Brassens, Yves Montand, Jacques Brel… En
grandissant au Nigeria, j'ai été exposé aux musiques traditionnelles, avec mon
père qui est igbo, et des artistes comme Prince Nico Mbarga, Orlando Julius,
Oliver de Coque… mais aussi d'autres plus connus, comme Fela Kuti ou encore
King Sunny Ade. A l'école, tous les matins, on chantait des hymnes religieux.
J'ai donc beaucoup d'influences musicales.
D’où vient le nom Nai-Jah ? Que
signifie-t-il ?
« Naija » est le mot qu'on utilise
pour désigner le Nigeria, en pidgin english, une sorte de créole anglais. Le
terme « Jah » fait référence à Jehovah, Yahvé, Dieu. Le Nigeria est un pays très religieux, et parfois les croyances y
sont illusoires… C’est aussi un pays malheureusement très corrompu et
pauvre… En utilisant ce jeu de mot, entre le Nigeria et Dieu, je questionne son
fonctionnement. Allons-nous prier Dieu pour qu'il aide notre pays ou
allons-nous prendre notre pays en main pour le faire avancer ?
Que s’est-il passé pour le groupe au cours de
toutes ces années ?
Nous avons sorti deux EPs. Le premier, A Few Miles Away, est sorti en 2011. Nous
étions en formule trio, sur un EP aux sonorités vraiment très acoustiques. Le
deuxième, Soldier Man, a été publié
en 2014, avec une guitare électrique, des chœurs et des sons plus travaillés. Notre dernier album en date, Masquerades,
est sorti le 15 mars. Il est l'aboutissement artistique de notre parcours, la
suite logique de nos deux premiers EPs. Nous avons également tourné
dans différents coins de la France, en Suisse et en Allemagne.
Quand avez-vous commencé à travailler sur le
nouvel album ?
Ça a commencé il y a longtemps ! J'avais vraiment
envie de sortir un album représentatif de notre évolution et des différentes
rencontres que j'ai pu faire. A mon retour du Nigeria, en mai 2018, le travail pour
finaliser ce disque m'a paru évident, avec un retour aux sources, en y incluant
des chansons comme « Fankanda » et « Uwa Shirike ».
Où et quand a-t-il été enregistré ?
L'album a été enregistré à Homely Records, près de
Lyon, en fin d'année dernière, avec tous les musiciens du groupe. Sur deux
morceaux, nous avons Christopher Reyes à la guitare. Nous avons aussi fait
venir Illspokinn, un rappeur américain, sur le titre « Work
Everyday ». En bonus, « Overcome » a sa version dub,
« Overdub », de Alpha Steppa, avec qui je collabore régulièrement.
Quels thèmes et quels rythmes explorez-vous
sur ces neufs morceaux ?
La plupart des morceaux ont un rapport avec le Nigeria
et l'Afrique en général. Les thèmes abordés sont vraiment ceux qui me touchent
et me parlent, en lien avec mon vécu. Les rythmes oscillent entre le reggae
roots et le new roots, le hip hop et la musique traditionnelle igbo. Même si le
reggae reste la base de notre musique, j’amène de mon côté cette touche afro,
et le soubassophone, qui est utilisé comme basse, amène une touche de la Nouvelle-Orléans.
C'est vraiment la rencontre de différents styles.
Où a été prise la photo de la pochette de
l’album ?
Au Nigeria, dans le village où a grandi mon père, dans
le sud du pays. La photo a été prise par Cynthia Bitar qui réalise également
tous nos clips.
Quand avez-vous rencontré Khanti Records ?
Notre claviériste, Raphäel Macler, a joué au Nomade
Reggae Festival et y a rencontré Jérôme, qui est à la tête de Khanti Records, par
l’intermédiaire de Julie Rudelin, qui travaille à La Tannerie à Bourg-en
Bresse. Nous avons commencé à bosser ensemble à la fin de l'année dernière pour
la sortie de l’album.
Des dates de concerts sont annoncées pour les
prochains mois, et aussi un Dub Tour. Quelle est votre formation en version
dub ?
Avec le groupe, nous avons effectivement des dates
annoncées pour les prochains mois, avec la première partie de Ziggy Marley au
Afrika Tage à Vienne en Autriche le 13 août, et le Plein-les-Watts Festival le
16 août, entre autres. En version dub, je travaille avec Alpha Steppa, avec qui
nous avons sorti un album, en septembre 2018, intitulé The Great Elephant. Je suis au chant et lui aux machines. Nous
avons aussi quelques belles dates ensemble cet été, comme le No Logo Festival,
l'Ostroda en Pologne et le Uprising Reggae à Bratislava !
Quels sont les projets de Nai-Jah pour les
prochains mois ?
Nous allons continuer la promotion de Masquerades avec un nouveau clip qui
sortira à la rentrée. Nous avons aussi la volonté de sortir le disque en vinyle
pour la fin de l'année. Enfin, nous préparons une tournée pour cet automne pour
continuer à mettre en avant ce nouvel album roots-afro qui nous tient beaucoup
à cœur… A bientôt !
Simba
(pour Reggae Vibes Magazine n°67 - août/septembre 2019)
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