vendredi 16 février 2018

SOJA - Interview

Depuis le 27 octobre, les américains de SOJA ont un sixième album studio en poche, Poetry in Motion. Celui-ci a été enregistré au Dave Matthews Band’s studio, chez eux, en Virginie, pour révéler toute la poésie de cette nouvelle mixture. Après le remarquable Amid The Noise and Haste, où figuraient notamment les hits « Your Song » avec Damian Marley, « I Believe » avec Michael Franti et Nahko, le groupe en a aussi profité pour réaliser, l’année dernière, l’album Live in Virginia.  Interview avec Jacob Hemphill à propos de la musique toujours en perpétuel mouvement de SOJA.

Il y a trois ans sortait Amid The Noise and Haste. Comment est né son successeur, Poetry in Motion ?
Alors que jusqu’ici le processus consistait pour le groupe à se retrouver dans une petite pièce pour écrire et enregistrer la musique ensemble, pour cet album, nous avons écrit et enregistré ensemble au Dave Matthews Band’s studio, dans les bois en Virginie. Pour nous, c’était incroyablement amusant et inspirant de le faire de cette manière, tous ensemble en tant que groupe dans un studio.

Il se passe deux ou trois ans maximum entre chaque album de SOJA, on peut dire que vous êtes plutôt réguliers ! Comment procédez-vous pour travailler sur un album ?
Il n’y a pas vraiment de planification. Je suppose que j’écris constamment de la musique et des paroles. J’ai toujours des cahiers remplis de chansons que nous utiliserons peut-être un jour, ou pas… Le réel processus est de mettre l’album complet en place ensemble avec tout le groupe.

Que signifie le titre Poetry in Motion ? Quel est le thème de cet album ?
Poetry in Motion parle de nous, l’espèce humaine. Nous sommes beaux, nous sommes la poésie qui est en mouvement pendant que la Terre tourne. Nous sommes les gardiens de cette Terre et de tout ce qui vit ici et qui forme notre maison à tous. Mais quelque chose ne va pas… Quelque chose en nous a disparu… Voilà la question et l’objectif : comment revenir à la beauté de cette poésie et s’éloigner de tout le reste ?

Qui a réalisé le visuel assez énigmatique de la pochette ?
Une artiste originaire de Bangkok nommée Pomme Chan. Nous adorons travailler avec elle. Elle est excellente !

Pourquoi avoir repris les paroles de « Lucid Dreams » (feat. Nahko sur Amid The Noise and Haste) sur le titre « I Can’t Stop Dreaming » ?
Nous avons commencé à jouer « Lucid Dreams » avec le groupe et avons créé de nouveaux arrangements. J’adorais tellement les paroles de l’originale que nous avons décidé d’en faire une nouvelle chanson. Le résultat donne « I Can’t Stop Dreaming ».

« To Whom Make It Concern » est une chanson de l’EP Stars and Stripes, sorti en 2008…
C’est une des favorites de nos fans en concert. Nous avons redessiné une grande partie de l’instrumentale depuis la sortie de l’EP, tous les fans n’en sont pas forcément conscients. Nous avons donc fait une nouvelle version et la ressortons ici.

Allez-vous faire des clips de certaines chansons de Poetry in Motion ? Lesquelles ?
Oui, nous avons déjà fait plusieurs vidéos et songeons encore à quelques-unes. Je n’ai pas envie de toutes les révéler maintenant, mais il est notamment question des vidéos de « More » et « Fire In The Sky »…

Il y a un an, nous avons pu découvrir votre premier album live, Live in Virginia, enregistré en juin 2016 au Wolf Trap National Park. Qu’est-ce qui vous a décidés à faire cet album live sur cette tournée ?
Ça nous a semblé être le bon moment pour nous et nous étions ravis de le faire dans un lieu où nous allions tous étant enfants. La Virginie est notre maison, il était logique et agréable de le faire là-bas.

Pourquoi n’avez-vous pas enregistré d’album live auparavavant ?
Je ne suis pas sûr que ce soit vraiment le premier… Nous avons fait le DVD Live in Hawaii et enregistré d’autres shows live. Là, le moment et la vibe étaient les bons, nous l’avons fait naturellement.

Pourquoi Live in Virginia est-il uniquement disponible en digital ?
Pas de raison particulière. Nous en sortirons peut-être une version physique un jour…

Cet album live a été nominé au Grammy Awards dans la catégorie « meilleur album reggae » l’année dernière, comme Amid The Noise and Haste en 2015. Que représentent ces nominations pour le groupe ?
Bien que nous ne fassions pas de la musique pour gagner des prix, les nominations aux Grammys Awards sont incroyablement gratifiantes. Nous sommes également honorés car les Grammys sont sélectionnés et votés par nos collègues musiciens et producteurs. C’est la reconnaissance de nos pairs, ce sera toujours spécial pour nous.

Quand serez-vous en concert en Europe ?
Bientôt… En 2018 !

Pour finir, que souhaites-tu dire aux lecteurs de Reggae Vibes ?
Merci à vous de lire cette interview et d’avoir un intérêt pour SOJA et pour le reggae en général. Une des plus belles choses que nous avons découverte en voyageant tout autour du monde, c’est que le reggae est un langage universel qui résonne et qui est compris et ressenti dans le monde entier. Nous sommes bénis de pouvoir en jouer !

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine #57 - décembre 2017/janvier 2018)

mardi 13 février 2018

Salim Jah Peter

Salim Jah Peter commence en tant que danseur-chorégraphe entre 1989 et 1993, au Niger. Il chante déjà dès qu’il le peut, rencontre Dada Leyni, qu’il considère comme son parrain, et d’autres qui contribueront à renforcer sa persévérance artistique, notamment Rita Marley et Fela Kuti. Son nouvel album, Nature, est sorti le 3 novembre.
Salim Jah Peter part à Abidjan, où il intègre le groupe Mystic Vibration de 1994 à 1998, puis crée Mystic Ténéré qui tournera dans bon nombre de pays africains. S’il quitte pendant plus de dix ans le Niger pour la Côte d’Ivoire, c’est parce que la tradition ne lui permet pas de chanter, s’opposant à ce qui était attendu de lui. Influencé aussi bien par la musique expérimentale que traditionnelle, l’afrobeat, le blues africain et, bien sûr, le reggae roots, Salim Jah Peter embrasse pleinement la foi rasta. Son premier single sort à son retour au Niger, en 2003, « Le Message de Jah ». L’année suivante, il s’installe à Paris. Son premier album, Les Vautours, paru en 2007, dénonce la corruption omniprésente. Il est mal accueilli par les politiciens du Niger et le chanteur se retrouve interdit de séjour dans le pays durant trois années. En 2009 sort Hold Up de Pouvoir, en réaction à la situation sociale et économique nigérienne des plus inquiétantes, le pays comptant parmi les plus pauvres au monde. Cet album est censuré dès sa sortie. Après le coup d’état du 18 février 2010, il revient au Niger pour une tournée sur l’ensemble du territoire, portée par le projet La Caravane pour la paix, la démocratie et la réconciliation nationale. « Je milite pour la liberté des hommes à penser, créer et disposer d'eux-mêmes. Je chante les espoirs et les interrogations de ceux qui n’ont pas la parole. L’objectif de ce projet était également de sensibiliser la population à la non-violence pendant les élections… »
C’est au cours de cette tournée qu’il se rend compte de l’état de son pays, concernant les déchets et la protection de l’environnement. Il commence alors à travailler sur l’album Nature. Il sera aussi le dernier album enregistré au studio Davout… 15 titres mis en boîte avec Clément Tamal et une belle équipe de musiciens, qui convient également quelques voix bien appréciées, Winston McAnuff, Lyricson, Devi Reed, Cheik Tidiane Seck… « Plus que jamais la protection de la planète nous concerne tous ! Ce projet Nature Eco France Afrique, avec l’association Racines Profondes, peut également s’appeler Tournée Nature Eco. Son lancement a eu lieu au Bénin en juin dernier. Nous en avons tiré un film de dix minutes, Des Racines pour l’avenir, que nous présentons lors de ces évènements. (…) Nous travaillons sur des projets à long terme au Niger, de transformation des déchets, de création d’emplois pour les femmes veuves et les handicapés… Je souhaite donner des spectacles pour informer la jeunesse sur les dangers de cette pollution. Il y aura un grand évènement Nature Eco Noël, en décembre ou janvier, avec la mairie de Paris. Je vous invite également à venir avec nous ramasser les déchets nuisibles ! Nous nous rendons dans douze pays d’Afrique, en commençant par le Niger, avec quinze dates fin janvier 2018, et nous attendons le retour d’une cinquantaine de villes en France… Tous les détails seront sur nos pages :  www.facebook.com/salimjahpeter et www.facebook.com/racinesprofondes. One Love Reggae Vibes ! »

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine #57 - décembre 2017/janvier 2018)

samedi 10 février 2018

Jaqee

Le 29 septembre dernier est sorti le nouvel album de Jaqee, nommé Fly High. Le septième en douze ans, où la chanteuse en profite pour continuer d’explorer tous les styles qui titillent ses cordes vocales, sortir des sentiers battus et se révéler à elle-même, aussi bien en tant qu’artiste qu’en tant que femme.
Née en Ouganda, Jaqee a passé une bonne partie de sa vie en Suède et réside actuellement en Allemagne. Son premier album, Blagalixious, principalement marqué par le blues et la soul, a vu le jour en 2005. Bien déterminée à vivre sa passion pleinement et sans aucune retenue, les albums suivants lui permettent de toucher à tous les styles qu’elle affectionne, notamment le reggae et le dancehall : Nouvelle d’Amour (2007), Letter To Billie (hommage à Billie Holiday, 2008), Kokoo Girl (2009), Land Of The Free (2010) et Yes I Am (2013). En voici venu un tout nouveau aux multiples couleurs : Fly High. Toujours en perpétuel mouvement, elle est le genre d’artiste à qui il est impossible de coller une étiquette ! De l’acoustique au dancehall, en passant par la soul et l’électro, Fly High réunit vigoureusement une multitude de sonorités, sublimée par la voix singulière de la chanteuse. Le résultat donne un album puissant et authentique, énergique et très ouvert, sur lequel on peut retrouver les titres déjà clipés « Fly High », « Miracle », « Lullaby » et « Hello », mais aussi découvrir de véritables dancehall hits, « Tambuula », « Oh Sister », ou encore « Zola’s Dance », berceuse écrite pour sa fille… C’est d’ailleurs lorsqu’elle était enceinte qu’elle a commencé à travailler sur cet album. En quête de compréhension de ce que nous sommes vraiment, Jaqee s’est mise à écrire ses nouvelles chansons en souhaitait éclaircir les côtés les plus sombres de son existence. La majeure partie en a ensuite été enregistrée à Berlin, quelques cordes et cuivres en Suède, et quelques parties en Ouganda. « Mes albums sont toujours personnels. C’est plutôt l’approche quand j’écris qui nuance l’expression. Pour Fly High, je me sentais à la fois très vulnérable et très forte. Vulnérable, par rapport à toute la logistique que nécessite la vie de famille, tout comme la réalisation d’un album. Coordonner ces deux univers est un défi plutôt amusant. Et forte, parce que la maternité m’a montré la force et la beauté que possèdent le corps et l’esprit féminins. Les femmes sont à la fois douces et fortes. Nous devons nous faire confiance et nous soutenir davantage les unes et les autres. (…) Les thèmes des chansons de Fly High tournent autour de la vie en général, avec ses bas, ses moyens et ses hauts, en quelque sorte. Je pense que c’est mon meilleur album. Il a vraiment un groove puissant, immédiat et émotionnel. J’aime grandir et ne pas me répéter artistiquement ! » Jaqee et ses musiciens devraient être en concert en France l’année prochaine. D’ici-là, soyez prêt à vous envoler très très haut !

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine #57 - décembre 2017/janvier 2018)

mercredi 7 février 2018

Wailing Trees

Deux ans après la sortie de The World Go Round, les sept musiciens de Wailing Trees sont de retour avec un nouvel opus, Change We Need, disponible depuis le 12 mai dernier. Toujours aussi éclectique, le groupe a mûri son style, comme en donnent un excellent aperçu les clips déjà sur la toile du titre éponyme et de « What A Gwaan? ». 
« Change We Need est la suite logique de The World Go Round. Le premier était une sorte de fresque, le second est comme une photo. Dans ce nouvel album, nous avons voulu décrire nos réactions face à tout ce qui a pu se passer dans le monde ces dernières années. Nous avons cherché à faire un album plus épuré, avec un son plus moderne et une direction artistique actuelle, c’est pourquoi nous avons fait appel à Umberto Echo pour le mix (Dub Inc, Jah Gaïa, Sara Lugo…). Les premiers brouillons ont été élaborés vers octobre 2015, mais le vrai travail de composition a démarré au printemps suivant. Nous avons aussi voulu évoquer tous les changements qui se sont passés dans le groupe depuis The World Go Round, en l’occurrence deux nouveaux membres, une nouvelle manière d’appréhender la musique et la production… Le morceau « Change We Need » est assez emblématique et correspond à la thématique générale de l’album. Le monde a vraiment besoin d’un élan positif et collectif dans tous les domaines pour amorcer un changement global qui mettrait le bonheur des humains au centre des questions essentielles. Nous ne sommes pas une part de marché, des codes-barres, du bétail ou des statistiques… Nous sommes les habitants d’une planète qui mérite qu’on la respecte, comme chacun de ses hôtes. (…) Les prises ont eu lieu dans un studio lyonnais qui s’appelle Woodlark Studio. En terme de son, nous avons le sentiment d’avoir franchi un cap et d’avoir une production qui se rapproche de la musique que nous écoutons. Dans l’ancien album, on voyageait beaucoup au sein d’un seul morceau, avec des parties différentes et des choix parfois un peu complexes. Dans celui-ci, le chemin se fait plus posément au fil de l’écoute, avec des titres qui vont davantage à l’essentiel et des esthétiques plus assumées. L’évolution qui existe entre les deux albums se ressent encore plus en concert. Le show est très énergique et musical. Avec toute la route que nous avons déjà fait ensemble, nous avons une réelle connexion sur scène, entre nous et avec le public. Notre vraie force se trouve sur scène ! Chacun a son mot à dire, avec ses propres parties de solo. Nous faisons beaucoup participer le public, afin que chaque soir soit différent. Nous avons travaillé le son, la lumière et même la mise en scène pour offrir un spectacle qui marque les esprits. Nous allons bientôt commencer à prendre du temps pour composer un autre album, mais nous avons très envie de sortir encore plusieurs clips, tout en nous concentrant sur les dates qui arrivent, pour continuer à présenter Change We Need. La tournée continue ! »

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine #57 - décembre 2017/janvier 2018)