Dix ans après ton premier album, Man Free, tes inspirations musicales sont-elles toujours les mêmes ?
Depuis ce moment-là jusqu’à aujourd’hui, je crois que je suis encore plus
inspiré ! Comme nous le savons tous, l’expérience enseigne la sagesse.
J’ai écrit d’innombrables chansons et une belle poignée d’albums figure dans
mon catalogue, sans compter tous les morceaux inédits et ceux que j’ai encore
dans mes tiroirs…
Pourquoi as-tu décidé d’appeler ton nouvel album New Dawn ?
J’ai choisi ce titre en raison de toutes les choses qui ont permis de
mettre en place cet album. C’est comme une renaissance. Par exemple, la rencontre
avec Jonas et son groupe. C’est aussi la première fois que je fais un album
avec ce concept entièrement roots. Je le sens vraiment comme une ouverture sur
l’avenir.
Quand as-tu commencé à travailler sur New Dawn ?
Nous travaillons dessus depuis plus de deux ans et demi. Au début, il y
avait surtout des pistes MIDI. L’année dernière, quand nous nous sommes mis en
relation avec le label Khanti Records, nous avons décidé d’aller au Wise Studio
pour avoir une vraie vibration live.
Quand et comment as-tu rencontré Jonas « Koffi » Gouraud qui a composé tous les instrumentaux ?
Je crois que c’était en 2015. J’ai reçu un email sur Facebook qui disait : « Salut Omar, je suis un batteur et producteur de riddims français. Je fais du roots et du new-roots. Je peux t’envoyer quelques riddims pour que tu les écoutes et voir si nous pouvons faire quelque chose ensemble. » Il m’en a envoyé quelques-uns qu’il avait déjà faits avec d’autres artistes et j’ai tout de suite aimé le style qu’il avait. Il m’a ensuite envoyé quelques instrumentaux sur lesquels j’ai posé ma voix et encore d’autres. Je ne pensais pas à faire un album à ce moment-là mais quand nous avions déjà cinq ou six morceaux, j’ai senti que c’était le début d’un nouveau voyage, donc nous avons décidé de faire un album complet ensemble.
Comment s’est passée la collaboration avec le Soulnation Band pendant les enregistrements ?
C’était génial parce qu’ils avaient répété avant pour bien savoir ce qu’ils devaient faire. Ils étaient tous très énergiques et prêts à s’impliquer totalement dans le travail de studio. Ce sont de jeunes musiciens et ils s’étaient préparés à travailler dur pour ce projet.
Depuis quand vis-tu en Belgique ? Avais-tu déjà travaillé avec des musiciens français auparavant ?
Je vis en Belgique depuis plus de quinze ans maintenant. Oui, j’ai travaillé avec quelques musiciens français depuis le temps. Le premier et le meilleur groupe avec lequel j’ai travaillé est le Homegrown Band mené par Guillaume « Stepper » Briard. Nous avons d’ailleurs produit l’album Can’t Stop Us en 2009 ensemble.
Les deux chanteurs de Dub Inc apparaissent sur le titre « Sound The Trumpet ». Comment est née cette collaboration ?
Avec Dub Inc, on se connait depuis 2005. Je les ai rencontrés à Saint-Etienne
par l’intermédiaire d’un ami commun. A l’époque, ils voulaient que je participe
à leur second album, Dans Le Décor.
Ça a donné « Achtah », un big tune ! Nous avons eu l’habitude
d’être sur des festivals ensemble au fil des années. Quand nous jouons ce
morceau, il y a toujours un énorme engouement dans le public. Quand Jonas m’a
envoyé des instrumentaux et que j’ai entendu ce dernier, j’ai tout de suite su
que c’était parfait pour faire un featuring avec Dub Inc. Donc j’ai contacté
Komlan et je leur ai proposé, ils étaient tous les deux partants. J’ai écrit la
chanson et je leur ai expliqué le thème pour les espaces que je leur avais
laissés sur l’instrumental.
Comment ont été écrites les chansons avec Jah Mason (« Educated Fools ») et Cedric Myton (« Checking For Me ») ?
Vous savez que The Congos est l’un des principaux groupes qui travaillaient
avec mon père. Je suis proche d’eux depuis que je suis tout petit. Quand ils
jouent en Belgique et que je ne suis pas trop occupé, j’essaie toujours d’aller
les voir. Là aussi, il y avait un riddim que m’avait envoyé Jonas qui était exactement
le style des Congos. J’ai appelé Cedric, je lui ai dit que je travaillais sur
un nouvel album et que je voulais qu’il soit dessus. Il m’a répondu :
« Omar, tu sais que tu es comme un fils pour moi. Envoie-moi le riddim,
j’enregistrerai en Jamaïque et je t’enverrai les voix. » C’est ce qu’il a
fait juste après. Même chose avec Jah Mason, je le connaissais quand j’habitais
en Jamaïque. Au milieu des années 1990, je travaillais au One Blood Studio de
Junior Reid. Nous sommes bons amis depuis cette époque. Je savais que nous
ferions un jour un duo ensemble. Je suis allé en Jamaïque pour le voir, c’était
la dernière chanson de l’album. J’ai aussi écrit les paroles et laisser des
blancs pour sa partie.
Tes chansons parlent d’humanité, de liberté, de violence… Que penses-tu de la situation actuelle dans le monde ? Comment peut-on être rasta en 2018 ?
Etre rasta n’a rien à voir avec l’époque mais plutôt avec la façon de voir
la vie et la réalité. C’est être conscient de son environnement. Etre rasta est
un concept concernant la manière dont on veut vivre. Si je n’étais pas artiste,
je ferais un travail différent mais je pourrais toujours être rasta et garder
la même méditation. Comme disait Marley, tout le monde a le droit de choisir
son propre destin, et j’ai choisi le mien.
Tu es le fils de Lee « Scratch » Perry, un grand homme dans le reggae ! Quelle est la plus importante leçon que tu as reçue de ton père ?
Il faudrait des pages en plus pour raconter tout ça ! La principale
leçon que j’ai apprise de lui est de ne jamais abandonner, d’être toujours un
meneur, de ne jamais laisser quelqu’un vous dire que vous ne pouvez pas.
Pour finir, qu’aimerais-tu dire aux lecteurs de Reggae Vibes ?
Il y aura des obstacles sur le chemin tout au long de votre vie. Quand tu
tombes, relève-toi et essaie encore. La chose le plus importante dans la vie
est la famille et de se soutenir les uns les autres. Il faut donner de l’amour
si tu veux en recevoir. Blessed Love !
Simba
(pour Reggae Vibes Magazine n°60 - juin/juillet 2018)