Avec son Deep Rockers, Naâman a conquis les
foules en un rien de temps. Un nouvel album, Rays of Resistance, est disponible depuis le 30 octobre chez
SoulBeats Records. Rencontre avec le chanteur, pour faire le bilan de ce
premier essai et nous présenter sa suite, alors qu’il se ressource en terre
hindoue.
Bonjour Naâman,
s’il est temps de parler de ton nouvel album Rays of Resistance, que retiens-tu de 2015 ?
2015 a été une année particulièrement marquante pour moi, puisqu’elle a
commencé par un recentrage, grâce à mes voyages au Népal, en Inde, puis au
Liban, suivi d’un break de trois semaines en Jamaïque, où j’ai écrit la majeure
partie de mon album Rays of Resistance.
Sont venus ensuite les deux mois d’enregistrement au studio Haxo à Paris, puis
la tournée estivale et la sortie de l’album. Nous avons eu la chance de jouer à
de magnifiques festivals, les Francofolies de la Rochelle ou encore le Rototom
Sunsplash à Benicassim, en Espagne… La tournée d’automne a été marquée par les
terribles évènements du 13 novembre, qui nous ont tous profondément touchés… Au
delà de la blessure, mon équipe et moi-même avons, à ce moment-là, pris
réellement conscience du pouvoir de la musique et de son message d’amour. Nous
sommes davantage soudés, c’est une raison supplémentaire de s’accrocher et
continuer.
Que s’est-il
passé depuis Deep Rockers Back A Yard ?
Depuis la sortie de l’album Back A
Yard, il y a eu des concerts un peu partout, du Canada à la Chine, en
passant par la Russie et la Nouvelle Calédonie… J’ai aussi fait plusieurs
allers-retours en Jamaïque, où j’ai donné quelques lives avec des musiciens
locaux. J’y ai d’ailleurs rencontré Massy et Triple avec qui on a enregistré
l’EP Know Yourself. Ce projet a été
l’occasion, pour notre association 1001prods, de créer le label Big Scoop
Records, géré par Fatbabs, Peter LB et moi-même. Tout ce qui s’est passé ces
trois dernières années a été l’occasion de renforcer nos liens, synchroniser et
perfectionner le travail. Aujourd’hui, tout va pour le mieux, c’est un immense
plaisir de travailler avec ceux qu’on aime !
Quand as-tu
commencé à bosser sur ton album Rays of
Resistance ?
Le travail démarre toujours avant qu’on s’en rende compte… Par exemple, le
morceau « Karma » a été écrit sur la route en tournée, il y a au
moins deux ans… « Garden of Destiny », avec Massy et Triple, date de
l’été 2014, tout comme « My Days » avec Soom T… On a vraiment commencé
à parler d’album avant que je parte au Népal en novembre. Fatbabs avait déjà des
tas d’idées de riddims et les a travaillés avec les musiciens jusqu’à mon
retour en France en mars 2015. C’est là que nous sommes entrés en studio et que
nous avons débuté les enregistrements.
Comment présentes-tu
ce nouveau projet ?
Cet album est un mélange de plein d’influences, les styles sont très
variés. Nous nous sommes permis d’aller au fond des choses, sans trop se
soucier de la durée ou de l’homogénéité. Sa particularité, c’est ce mélange de
soul, reggae, hip hop, parfois blues, dans une énergie consciente et
positive.
Es-tu retourné
en Jamaïque pour les enregistrements ? Avec qui as-tu travaillé ?
Nous avons choisi d’enregistrer l’album à Paris. Le premier ayant été fait
à Kingston, nous nous sommes dit que ce serait bien de faire celui-ci 100%
maison avec le Deep Rockers crew. Nous avons donc investi les studios Haxo,
avec nos collègues Exl et Vinz, qui avaient déjà travaillé sur Back A Yard et Know Yourself en tant qu’ingénieurs. Pour le mastering, nous avons
fait ça à La Source avec Jean-Pierre Chalbos. Nous avons eu le plaisir de
travailler avec les choristes de Groundation, Kim et Sherida, qui ont fait un
travail incroyable sur plusieurs titres. Je pense aussi à mon ami et artiste
Adil Smaali qui a magnifié le morceau « Hopeful World » par sa
prestation.
Tu es toujours
accompagné de ton acolyte Fatbabs ! Vos envies musicales évoluent-elles
dans le même sens ?
Fatbabs est le bras droit, on roule ensemble. Nos envies et goûts musicaux
évoluent dans le même sens. Même si on n’a pas les mêmes influences, on aime
les mêmes choses. Différentes racines, un seul arbre !
Que signifie
pour toi le titre Rays of Resistance ?
Le mot « rays » fait référence à cette flamme intérieure qui
brûle en chacun de nous. C’est en se reconnectant avec soi-même, avec son
essence, que l’on peut se délester de ce qui nous empêche de briller. C’est de
là que peut naitre la vraie « résistance », celle qui fait que
l’amour reste vainqueur malgré le tumulte de nos émotions. Un homme libre est
apte à penser consciencieusement et à mettre en place des solutions
alternatives accessibles à tous, ce qui amènera à un éveil de la population et,
qui sait, peut être à une réécriture de la constitution par le peuple pour le
peuple ! Rays of Resistance est
un appel à l’éveil, mêlé de vibes positives et de textes conscients.
Quelles ont été
tes sources d’inspiration pour écrire les morceaux de cet album ?
Je m’inspire de tout ce qui m’entoure : les gens rencontrés, les
paysages parcourus, les événements passés et les émotions traversées… J’ai une
grande foi en l’humanité et c’est elle qui me donne l’envie d’écrire et de
chanter. C’est elle qui est à la base de tous mes textes, diluée parmi les
différents thèmes abordés. Il m’est aussi arrivé certaines choses ces dernières
années qui ont poussé ma réflexion et alerté davantage ma conscience. Cette
recherche de vérité, cette spiritualité, est ma principale source d’inspiration,
aussi bien dans la vie que dans ma musique.
Quelle est
l’histoire du morceau d’ouverture « Resistance » ?
Quand j’ai quitté la France en novembre 2014, l’assassinat du jeune
manifestant Rémy Fraisse par les forces de l’ordre m’a profondément touché.
Comment un jeune français faisant entendre sa voix chez lui pour protéger l’environnement
ou quoique ce soit d’autre peut-il se faire tuer par son propre gouvernement ?
Qui décide de nos vies ?... A mon retour, peu après les attentats de
Charlie Hebdo, toute une trainée politique s’était réunie hypocritement pour la
liberté d’expression. Le contraste a été fort et a fait monter en moi un
sentiment de révolte face à leur manipulation aussi grossière qu’insultante.
Jusqu’à quand va-t-on laisser une poignée de voleurs et d’assassins décider du
sort de nos vies ? Les temps changent, les gens comprennent, et les nouvelles
générations seront de plus en plus décidées à reprendre le contrôle du pays,
trop longtemps laissé à une minorité malintentionnée…
Y a-t-il un
titre qui a été plus difficile à finaliser que les autres ?
« Pop Dem Bubble » a été pour moi le morceau le plus difficile à
finaliser, car il ressemble beaucoup à ce qu’on a fait sur Back A Yard. J’ai du mal à trouver l’inspiration quand je tourne
autour d’un même style. J’ai presque eu l’impression de travailler sur un
deuxième « Skanking Shoes » !
Quelques mots à
propos des invités qu’on trouve sur cet album : Nemir, Soom T, Massy The
Creator & Triple…
Tous les invités sont des artistes dont nous apprécions le travail. Soom T,
Massy et Triple sont des amis. Le côté humain est primordial, on obtient
toujours un meilleurs rendu en travaillant avec des gens qu’on apprécie ! Nous
avons emmené Soom T dans un univers différent de ce qu’elle fait d’habitude en
l’invitant sur le morceau « My Days ». Nemir nous a fait le plaisir
de participer au titre « Those Rays ». C’est un excellent artiste,
dont on attend l’album avec impatience !
La tournée de Rays of Resistance a démarré quelques
jours après sa sortie. Y a-t-il encore beaucoup de concerts au programme ?
La tournée va continuer jusqu’en octobre probablement. Il y aura encore
beaucoup de dates, de festivals, en France et à l’étranger. Toute l’équipe est très
motivée !
Comment
avez-vous travaillé le nouveau show ?
C’est la première fois que mes musiciens jouent vraiment leur album sur
scène, on l’a donc préparé avec plus de connaissance, d’amour et
d’investissement. C’était aussi l’occasion pour nous de jouer des styles plus
variés. Avoir un show de presque deux heures permet d’aller plus loin dans la
musique. On est tous plutôt jeune dans le métier et c’est intéressant de voir
la progression, les idées naissantes et les nouvelles possibilités. Mike, de
Sinsemilia, nous file toujours un coup de main pour la mise en place du live. C’est
un ami et une excellente référence dans d’innombrables domaines !
Pour finir,
qu’écoutes-tu en ce moment ?
Mon petit frère a remis la main sur un vieux disque dur que j’avais
adolescent ! J’écoute donc une playlist, aussi variée qu’interminable, de
vieux roots, qui accompagne parfaitement l’écriture du prochain album, posé
dans un backyard au sud de l’Inde !
Quels sont tes
plans pour 2016 ?
2016 sera une année chargée de concerts, d’écriture et de composition. Mes
plans sont de garder l’équilibre, alimenter la flamme… La suite vient toujours
toute seule…
Simba
(pour Reggae Vibes Magazine #46 - février/mars 2016)