dimanche 9 juin 2013

Mathew Nya - Nyahbinghi prophète

Musicien, auteur, compositeur et ingénieur du son, Mathew Nya présente son nouvel opus, Humble Lion. Epris de nyahbinghi et de dub poetry, c’est au détour de ses voyages et de multiples rencontres que naît toute son inspiration.

Comment as-tu commencé à faire de la musique ?
A l’école, dans le 94. Notre proviseur avait mis à disposition une salle de musique où j’ai pu essayer tous les instruments. De plus, mes voisins étaient rasta. Celui de droite passait des sélections toute la journée et celui de gauche jouait de la guitare. Ensuite, je suis parti à Londres, approfondir la musique en suivant des cours dans une école. Le matin, la musique sur ordinateur, et, l’après-midi, la pratique des instruments. De retour en France, j'ai fait une école d’ingénieur du son, qui m’a permis de réaliser des stages sur le terrain, comme au studio Davout, où j’ai rencontré Dennis Bovell.

Tu es particulièrement attiré par les percussions nyahbinghis, comment y as-tu été initié ?
J'aime les poèmes chantés et suis principalement intéressé par le rythme. Pour les live, je me spécialise dans la batterie et les percussions nyahbinghis, le kete repeater plus précisément. J’ai développé le heartbeat en vivant avec les griots de la famille Keita du Burkina Faso. Avec eux, j’ai compris le groove, la vie, les rencontres, les voyages…

Tu es d’origine vietnamienne et française, as-tu grandi en France ? De quelle manière ce métissage influe-t-il sur ta musique ?
Oui, je suis né en France. Mais j’ai voyagé avec mes parents à travers le monde, puis de ma propre initiative, pour savoir qu’il ne faut pas avoir peur des autres, comprendre qu'il existe plusieurs vérités… Nous formons un seul peuple. Mes deux cultures m’apportent deux visions de la vie. Je souhaite proposer, avec ma musique, de réunir les musiciens, qu’il n’y ait pas de frontières, ni barrières. Le nyahbinghi est la musique qui vient du cœur, une musique mondiale où tout le monde est bienvenu.

Quels sont tes sources d’inspiration et influences musicales ?
J’aime toute sorte de musique, dès qu’elle fait se réunir les gens, oublier les tracas du moment, se sentir mieux, penser, danser ou méditer. J'aime écouter de tout, du mandingue, du roots reggae, des musiques traditionnelles, des percussions, du blues, de la soul… Je m'inspire de la vie réelle, de ce que je vis, de ce que je ressens, des rencontres et des discussions échangées. J'essaie de dire ma façon de penser, avec juste quelques mots pour guider ou suggérer, et laisser celui qui écoute avoir sa propre réflexion.

Que trouve-t-on sur ton précédent album, Tu Sais Ce Que T’as A Faire ?
11 titres ou « la première récolte » ! J'ai appris toutes les étapes de création d'un album et j'ai essayé de réunir des instruments et musiciens du monde entier. On y trouve des titres avec le griot Fatogoma Keita, la venue du chanteur Oba SImba, le saxophoniste Maciek Lasser aux sonorités jazz, le guitariste Cleaver au lead rock, et Dennis Bovell au mix dubwise. Cet album est le fruit de rencontres, de voyages et de travail, pour une musique sans frontières. J’ai réalisé, composé, arrangé la base des morceaux. Ensuite, je les ai proposés aux différents musiciens, pour qu'ils apportent chacun leur touche, bien au-delà que ce que je pouvais imaginer. Il a été enregistré sur la route avec un matériel portatif, en passant par la France, la Jamaïque, les Etats-Unis et le Vietnam. C'était pas facile, mais nous y sommes arrivés. J'ai rencontré des gens formidables sur mon chemin, qui m'ont soutenu et aidé à développer ma musique, comme Lenie de reggae.fr, Gilbert Pytel et Thierry Blons de Reggae Vibes... Mais, il y a aussi des histoires plus sombres, les « musical sharks »… Ils essaient de prendre la lumière à de grands ou petits artistes en devenir, comme moi. Je n’ai rien touché pour tous les albums qui ont été distribués en 2011 et 2012, dans les magasins et en téléchargement légal, on ne m’a jamais retourné un seul CD ! Le distributeur a fermé et je n’ai pas été tenu au courant de quoi que ce soit. Ils continuent pourtant à les vendre sans me verser aucunes royalties… C’est un combat quotidien de garder l'espoir et continuer la création !

Ton nouvel album, intitulé Humble Lion, sera disponible au printemps. Peux-tu nous en dire quelques mots ?
Cet album est une évolution. Il est mieux enregistré et mieux produit. J'ai voulu exprimer mon expérience, ma vision… On y retrouve mes musiciens d'origine et aussi de nouvelles rencontres, Michael Crevier à la batterie, Brice Ahodan et Micky Malong à la basse, les choristes des L Free, Vijahya et Karolina, pour appuyer mes poèmes, et, bien sûr, Oba Simba. Je voulais un album ouvert sur le monde, avec du groove, la vibration positive et des lyrics conscients. Nous avons aussi une nouvelle équipe de distribution, Socadisc, plus droite !

Le titre « Humble Lion » résulte de ta rencontre avec Burning Spear, comment s’est-elle passée ?
La rencontre avec Mr Spear et sa femme est issue d'un long chemin ! Je n'aurais pas pu les rencontrer si je n'avais pas vécu l'expérience en l'Afrique avec les griots. J'ai pu jouer avec lui du nyahbinghi au Summerjam Festival, what a great time ! C’est lui qui m’a appelé « humble lion ». Sans m'en rendre compte, ça a influencé ma musique et mon travail, pour donner le meilleur de moi-même.

Y a-t-il des concerts prévus pour accompagner la sortie de l’album ?
Oui, nous serons en concert en juillet à Nice, à l'ile de Ré et à La Rochelle. Mais nous cherchons toujours une date pour la sortie de l'album sur Paris… Et si un tourneur, petit ou grand, accepte de nous faire confiance pour faire vibrer notre musique, il verra que c’est là qu'on se sent le mieux et qu'on donne le meilleur. Pour les live, nous avons une formation de base, basse-batterie-guitare-synthé, avec choristes et cuivres, suivant la taille et le budget, beaucoup d'invités, comme les griots et Oba Simba, si la question des visas n’était pas aussi compliquée ! Nous espérons pouvoir proposer notre show à de grands festivals et faire venir tous les musiciens. Aussi, j’organise pour l’hiver prochain un Live in Vietnam, où seront réalisés CD et DVD. Une équipe de tournage est prête à nous suivre à Hanoi pour cette occasion de réunir un peuple autour des vibrations positives de la musique. Nous cherchons les financements, les autorisations… Le travail continue !

Simba


(pour Reggae Vibes Magazine #29 - avril/mai 2013)

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